Caroll : un besoin récent de féminisation

C’est lors d’un RDV que j’ai fait la rencontre de Caroll, une très belle personne que j’ai la chance d’accompagner dans sa quête de féminisation grandissante. Elle a accepté de se livrer sur transbeauté et de nous faire part de son histoire que voici.

Caroll, peux-tu te présenter ?

Je suis Caroll, célibataire et j’ai la quarantaine. Je vis dans l’Essonne et je suis dessinatrice industrielle. J’ai vécu 20 ans avec une compagne, sans enfant, une décision partagée, chacune son appartement, épanouie sexuellement sans besoin de revivre mon attirance d’enfance d’être femme mais, j’avoue en me projetant sur ses désirs. Cela m’a valu d’être pour elle de bon conseil en shopping, et pour le plaisir une bonne copine. Nous nous sommes éloignées l’une de l’autre sur la fin et cette histoire s’est terminée ainsi. Je lui avais dis au début de notre rencontre qu’il m’était arrivé de m’habiller en femme et, que je ne ressentais plus ce besoin depuis que j’étais avec elle.

Depuis combien de temps as-tu envie de te sentir femme ?

Depuis très longtemps, je vis avec cette sensation intime. Plus exactement depuis le ventre de ma mère où, sans le savoir je devais être une fille très désirée, par elle et lui, car elle s’est mise en danger pour m’avoir. Je ne l’ai comprise que plus tard à vingt ans, en lisant de la psycho et en questionnant mes parents. Une délivrance pour moi de comprendre ce que cachait le rideau de mon éducation inconsciente, mon deuxième être. Fine, petits pieds, cheveux longs et semblant fragile, je n’avais pas la place du garçon modèle. On m’a prise pour une fille enfant. Je n’en étais pas à jouer à la poupée mais à fricoter avec un garçon de chambré par exemple (évidemment en faisant la fille tout le temps, des souvenirs inoubliables). Je passais mon temps avec les filles à l’école (c’était les seules personnes avec qui les discussions étaient intéressantes), j’essayais les fringues de ma mère, etc,…Je n’irai pas plus loin dans mon intimité. Tiens, récemment une tante m’a dit que je ressemblais à ma mère. La bascule, le retour de balancier vers mon besoin d’être femme s’est opéré 4 mois avant de rencontrer Jennifer . Et depuis tout a été très vite.

Pourquoi avoir fait appel à mes services ?

Je voulais avoir un maquillage professionnel. Il me fallait savoir si j’étais crédible ou pas. Le besoin de mesurer dans un miroir qui j’étais quand j’exprimais tout mon être. Jennifer m’a ainsi aidée et je ne l’en remercierais jamais assez. Je suis venue avec un sac de fringues et elle a pu ainsi me conseiller. Elle m’a offert un regard extérieur, le premier partagé en Caroll. C’est une copine de cœur maintenant, son travail dépasse son professionnalisme de maquilleuse et son bon goût pour les fringues. Elle est de ces rares personnes Humaines pour qui j’ai un profond respect. Après le RDV, je me sentais tellement à l’aise que je me suis baladée le soir, légère et sûr de moi, waouh ! Et imaginez-vous que pour ma future coiffure, j’ai envoyé les photos faites par elle pour avoir l’aide d’un styliste, et que maintenant j’écris pour me présenter à vous. Mais faire mon coming-out m’interroge encore.

Quelles sont les prochaines étapes dans ta féminisation et qu’est-ce que tout cela te procure ?

Je vais continuer à faire plus de place à ma féminité au quotidien et fusionner ce qui est devenu deux identités. Je me sens plus heureuse depuis, ce qui me conforte dans cet équilibre corporelle et psychique. Je vais apprendre à bien me maquiller seule, à prendre davantage soin de moi, à avoir une nouvelle voix et intégrer ce qui fait sens pour que Caroll ait sa place non pas dans une construction fantasmée mais réelle. Ce double m’a souvent fait peur et c’est pour cela qu’il est une source de fantasmes. La réalité est bien plus simple, elle mène plus souvent au suicide, j’y ai pensé adolescente. Je sais que je ne serai jamais une « femme bio ». Vivre en me sentant bien va certainement m’amener à me transformer complètement, jusqu’où ? On verra… Mes envies sont de shopper avec des filles, papoter, plaire, danser, faire des rencontres…Je suis sensible et désire enfin laisser place à la délicatesse et la douceur en moi, je sais que je ne peux pas en étant un garçon. Dans ce genre, je ne fais que masquer mes désaccords, déjà que je suis reconnue bien loin de la majorité d’entre eux.

Quelles sont tes craintes ?

Depuis ma récente féminisation certains signes sont venus à moi comme des révélations : le film de François Ozon Une nouvelle amie ou encore le témoignage du journaliste belge Bo Van Spilbeeck, des moments qui ont raisonné comme un « enfin je ne suis pas la seule à ressentir cela ». Le monde change. Il y a des hauts et des bas, comme pour tout. Dans ma vie sociale classique, la journée je suis tellement dans la reconnaissance du genre « garçon » que de mettre en avant Caroll m’interroge sur ce passage qui sera un moment compliqué. Il risque de me coûter très cher (opérations, perte de mon travail ?, identité dans les lieux publics). Je me prépare pour que l’évidence fasse jour à petit pas. Le soir et le week-end je revis. Aujourd’hui la question du genre est fondamentale dans notre société. Le droit des femmes, leur revendication d’égalité au quotidien montre qu’abolir cette différence du genre permettra d’accueillir toutes les façons d’être (homo, trans,…). Si la peur de cet inconnu pour la majorité des français bascule jusqu’à ce stade, ce sera bien sûr aussi grâce à l’avancée des autres pays, mais j’ai bon espoir. Le patriarcat a fait son temps, la vie sur la planète s’en souviendra longtemps. Tout cela est très excitant, je revis et me sens optimiste face à l’avancée des mœurs.

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